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Perceval 1ère partie

Perceval 1ère partie - Perceval l'enfant

Les histoires d’Arthur et des Chevaliers de la Table Ronde remontent à une branche de la littérature médiévale spécifique que l’on appelait : Matière de Bretagne. Cette Matière, très riche, reprend les origines (Monmouth et Wace), les adaptations romancées de Chrétien de Troyes et les mises en cycle du XIIIème siècle. Et c’est cet enrichissement permanent qui forme la Matière de Bretagne. Ces thèmes ne se sont pas perdus au fil des siècles, ils ont perduré et continué à faire rêver des nombreux artistes (écrivains, peintres, etc…). On note également dans les sources du mythe arthurien, des œuvres contemporaines telles que Sacré Graal des Monthy Python ou Excalibur de Boorman, démontrant que cet imaginaire a traversé le temps et fascine toujours autant le public.

Mais, si ces thèmes restaient encore dans des représentations anglo-saxonnes, il faudra attendre 2005 et l’apparition sur les écrans de télévision d’un nouvelle série, diffusée alors sur la chaîne M6, ayant pour cadre l’univers arthurien. Depuis, le phénomène est en marche et la série Kaamelott connaît un énorme succès. Elle se termine en 2009, après 6 saisons. A côté de cette adaptation télévisée, le phénomène continue de prendre de l’ampleur et se développe, notamment en BD et au cinéma, où une trilogie de films serait en préparation. Alexandre Astier, réalisateur, scénariste et interprète du Roi Arthur dans la série, a toujours gardé le contrôle de son œuvre, en évitant toutes dérives commerciales intempestives (c’est par exemple lui qui signe les scénarios des BD).

Afin d’intéresser un large public, et vu le format imposé par la chaîne aux débuts de la série, Kaamelott a été conçue comme une série humoristique. Ce n’est qu’au fil des saisons que l’univers est devenu plus sombre, à l’image de la chute du monde arthurien.

L’objet de cette étude sera de rendre compte de la figure de Perceval dans la série. En effet, à première vue, Perceval est un personnage comique, plus connu pour ses gaffes en tous genres que pour son héroïsme. Pourtant ce Perceval, interprété par Frank Pitiot, est un personnage de tout premier ordre, proche de ses origines littéraires et qui, au fil des épisodes, va retrouver son statut de héros du Graal, un titre qui lui avait été « volé » par Lancelot dans le cycle du LancelotGraal.

Perceval l’enfant

Déjà chez Chrétien de Troyes, il est précisé que Perceval est relativement jeune. De plus, comme il a toujours vécu loin de tout, dans sa forêt, il a un côté naïf propre à l’enfance. Ici, l’interprète n’est pas forcément plus jeune que le Roi Arthur, on peut néanmoins noter la couleur blanche de ses cheveux qui offre au premier contact une touche de candeur, qui est largement confirmée par ses actes et ses paroles.

Perceval exprime un sentiment de crainte envers la magie, comme lorsqu’il redoute que la dent de requin qu’il doit ramener du laboratoire de Merlin soit maudite et puisse lui attirer le mauvais œil(1). Puisqu’il croit aisément tout ce que l’on peut lui raconter, il se laisse alors vite aller à la récréantise, en passant son temps à la taverne, et en se laissant même entraîner dans des jeux d’argent(2).

La naïveté n’est pas le seul trait enfantin du personnage, il peut également se montrer capricieux et notamment en réclamant l’attention et la reconnaissance d’Arthur. On pense alors aux occasions où lui et Karadoc, son compagnon de jeu, viennent le réveiller en pleine nuit pour leur faire par de leur grief : « On en a gros ! »(3). Ce besoin de considération vis-à-vis du roi amène Perceval à le côtoyer régulièrement, et il arrive qu’Arthur retombe en enfance lui aussi, ce qui en font d’excellents camarades de jeu(4).

De fait, Perceval est un enfant, loin de chez lui, de sa famille, qui a besoin d’une présence paternelle auprès de lui. Dans les textes, Perceval n’a pas connu son père, chevalier mort au combat lorsqu’il était petit. Sa mère l’a alors élevé seule dans son domaine loin du monde de la chevalerie. Dans le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, Perceval, lors de son aventure, va retrouver une figure paternelle dans l’enseignement de Gornemant. Dans la série, le jeune homme « orphelin », bien qu’il ait toujours ses deux parents, mais que sa véritable hérédité soit révélée dans le Livre VI, entretient avec Arthur une relation très forte, ce dernier étant un « père » pour Perceval. De tous les chevaliers, seul Perceval a le privilège de manger en tête à tête avec le roi à de nombreuses reprises, mais c’est également le seul qui peut, dans des cas particuliers dormir sous la tente du roi(5). Et cette relation est à double-sens car Arthur porte une attention particulière à Perceval, il l’accompagne très souvent en mission.

L’épisode La conscience d’Arthur va même plus loin dans cette relation. Perceval revenant de mission où il a échoué sur une piste essentielle dans la quête du Graal se fait rabrouer par Arthur avant de se faire donner l’ordre d’aller se coucher. Arthur se retrouve alors seul avec sa conscience qui lui explique que « Perceval est comme un gamin. Et quelle est la plus grande peur des gamins ? Ils ont peur d’être abandonné. Perceval vous n’arrêtez pas de lui dire que c’est un nul, alors pour correspondre à l’image que vous avez de lui il est obligé d’en être un, quelque part ça le rassure(6) ».

Cela renvoie à des concepts de psychologie, celui de « l’enfant idéal »; une image parfaite que les parents se font de leur enfant avant la naissance et qu’ils lui imposent par la suite. Et dans notre cas, cela se traduit à travers le Graal. La scène la plus émouvante à ce sujet sera, sans doute, celle où le jeune homme ouvre son cœur, dans un monologue adressée à une prostituée. Il dit qu’il souhaiterait par-dessus tout trouver le Graal, pour le ramener à la cour, mais pas pour les honneurs, ni pour le Graal, juste par amour pour le Roi Arthur.

« Mais je m’en fous des honneurs, moi. Le Graal c’est pareil. Rien à péter. Moi la seule chose qui compte : c’est Arthur. Moi je suis peut-être pas un as de la stratégie ou du tir à l’arc, mais je peux me vanter de savoir ce que c’est que d’aimer quelqu’un(7) ».

Perceval aime Arthur, il représente tout pour lui, si bien qu’il ne sera jamais aussi fier que lorsque le Roi l’accompagnera à la salle des coffres pour conclure le succès d’une de ses missions, ce qui n’arrive pas très souvent(8). Le bonheur de l’enfant Perceval est de rendre fier son père Arthur.

(1) Voir l’épisode 20, La Dent De Requin – Livre I
(2) Voir notamment l’épisode 87, Les Paris – Livre II
(3) Voir l’épisode 36, Les Exploités – Livre II et l’épisode 16, Les Exploités II – Livre IV
(4) Voir l’épisode 78, La Grande Bataille – Livre III, où la fin de l’épisode se termine en bataille de nourriture entre les trois compères, dans les rires et la joie générale.
(5) Voir notamment l’épisode 37, Le Repos Du Guerrier II – Livre III
(6) Voir l’épisode 97, La Conscience D’Arthur – Livre II
(7) Voir l’épisode 65, L’Habitué – Livre IV
(8) Voir l’épisode 97, Le Trophée – Livre III

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